Une promesse d’azur : entre presqu’île et île, l’échappée belle
Imaginez une journée suspendue entre le ciel et la mer. Une journée où chaque minute compte, non pas par peur du temps qui passe, mais parce que chaque instant est une merveille en soi. Bienvenue sur la presqu’île de Giens et l’île de Porquerolles : deux joyaux de la Méditerranée qui semblent être nés d’un caprice divin. L’un ancré au continent, l’autre flottant librement au large, mais tous deux baignés du même bleu incandescent et parfumés aux effluves de pin et de sel.
Oui, on peut explorer les deux en une journée. Mais attention : un jour ici, ce n’est pas une course, c’est une odyssée. Il suffit simplement de se lever tôt, d’ouvrir les yeux grand, et de ne pas avoir peur de tomber amoureux.
Comment s’y rendre tôt, très tôt (mais ça vaut le coup !)
Le point de départ logique (et poétique), c’est Hyères. Ou plus précisément, La Tour Fondue, nom évocateur qui n’a rien à voir avec du fromage, mais plutôt avec un bout du monde civilisé, là où la route s’efface pour laisser place aux flots.
De là, à la fraîche, prenez l’un des premiers bateaux à destination de Porquerolles. En saison estivale, dès 7h30, les navettes se succèdent avec la régularité d’un métronome méridional. La traversée, une brève caresse de 15 minutes, vous déposera sur l’île avant que le soleil n’ait eu le temps d’énerver les cigales.
Porquerolles au petit matin : l’île comme vous ne l’avez jamais vue
L’arrivée sur Porquerolles à l’aube, c’est comme débarquer dans un roman de Pagnol réécrit par un rêveur. Les rues sont désertes, les vélos encore sagement rangés, le port n’est troublé que par le clapot des mâts. L’île n’appartient encore à personne, si ce n’est à vous.
L’idée ? Louer un vélo électrique (ou musculaire, pour les plus téméraires) dès l’ouverture des boutiques, généralement à partir de 8h. Evitez les engins les plus tape-à-l’œil – ici, simplicité rime avec authenticité.
Direction la mythique plage de Notre-Dame, élue plus belle plage d’Europe (et on veut bien le croire). Elle se mérite : un peu plus de 3 km à travers pinèdes et eucalyptus. C’est en arrivant que les mots vous manquent : un lagon translucide, une plage en croissant bordée par la forêt, et ce silence ouaté que seule une mer calme peut offrir. Prenez le temps. Respirez. Marchez pieds nus. Oubliez l’heure.
Une pause dans le village (et un détour gustatif)
Une fois repus de bleu et de lumière, retour vers le village. Là, sur la place principale, entre une fontaine et les branches tordues d’un platane centenaire, plusieurs petites adresses sauront amadouer vos papilles. Je vous recommande un arrêt chez L’Épicier Moderne — une épicerie fine à l’ancienne, mi-caverne gourmande, mi-table d’hôtes impromptue. Leur focaccia au romarin, dégustée à l’ombre, vaut toutes les panoramiques Instagram du monde.
Mais attention à ne pas trop vous éterniser : Giens vous attend. Et il serait dommage de lui faire faux bond.
Giens l’insolente : retour sur la terre presque ferme
On reprend le bateau vers 12h ou 13h – assez tôt pour éviter la cohue, assez tard pour garder dans la rétine les reflets mouvants du port. Une fois de retour à La Tour Fondue, pas besoin de prendre la voiture : la promenade commence ici.
La presqu’île de Giens est ce genre de lieu qu’on voudrait garder secret. Un peu sauvage, un peu capricieuse, souvent ventée, mais follement belle. Ses deux bras de sable – les célèbres tombolos – enserrent les anciens marais salants, aujourd’hui royaume des flamants roses et paradis des ornithologues.
Si vous êtes d’attaque, direction l’incontournable sentier du littoral. Chaussures fermées recommandées – les rochers, même sous le soleil, n’aiment pas les âmes distraites. On longe la côte ouest, entre les criques confidentielles et les falaises sculptées par le vent. À chaque recoin, un autre bleu, un autre souffle, une autre surprise. Et parfois, en fond sonore, un guitariste amateur qui a élu domicile juste là, au bord du vide, l’air de rien.
Une baignade sauvage pour les initiés
À Giens, les plus belles criques sont souvent les moins accessibles. Mais pour ceux qui n’ont pas peur de crapahuter (et qui aiment l’aventure), la récompense est inoubliable. La plage de la Darboussière, par exemple, nichée entre deux pans de falaises, reste hors des radars touristiques. L’eau y est plus fraîche, plus claire, et les poissons viennent parfois vous saluer de trop près. Si vous parlez leur langue, vous comprendrez peut-être ce qu’ils murmurent à l’oreille des ondines.
Un coucher de soleil au sommet
Pour finir cette journée déjà bien remplie, grimpez jusqu’au Mont des Oiseaux, l’un des rares points de vue à vous offrir simultanément la presqu’île, Porquerolles au loin, et – si le ciel est dégagé – la côte varoise tout entière, jusqu’aux Alpes scintillantes. À ce moment-là, l’or du couchant rend les pins incandescents, le vent se fait plus doux, et les conversations se taisent. Il n’y a plus que vous, le silence, et le sentiment rare, précieux, d’avoir saisi l’essence d’un lieu.
Conseils pratiques pour une aventure bien ficelée
- Horaires : Consultez les horaires de navette sur le site des Bateliers de la Côte d’Azur. En haute saison, les dernières navettes quittent Porquerolles vers 18h30 – ne ratez pas le dernier bateau, à moins de vouloir devenir naufragé volontaire.
- Vélos : Réservez votre vélo à l’avance, surtout en juillet-août. Femme avertie…
- Chaussures : Prévoyez des chaussures de rando ou des baskets antidérapantes pour explorer Giens. Les tongs, c’est bien, mais pas pour l’escalade impromptue.
- Sac léger : Une gourde, un en-cas, un maillot, une serviette et c’est parti. Moins vous portez, plus vous découvrez.
- Évitez les week-ends fous : Si possible, planifiez votre virée un mardi ou un jeudi hors vacances scolaires. Moins de monde, plus de poésie.
Une journée, mille sensations
On dit souvent qu’il faut choisir entre profondeur et diversité. Mais à Giens et Porquerolles, on peut tout avoir : le charme méditerranéen sans artifices, la beauté brute et spontanée, la rencontre avec une nature presque intacte, et cette drôle de sensation, en rentrant le soir, d’avoir un peu changé. Peut-être à cause du vent, peut-être à cause de la lumière. Ou tout simplement à cause de ce sentiment rare d’avoir vécu quelque chose de vrai.
Alors oui, vous n’aurez peut-être pas tout vu. Mais ce que vous aurez ressenti… ça restera.