Cote d'azur

Plage de la Palud Port-Cros : une crique sauvage au cœur du parc national

Plage de la Palud Port-Cros : une crique sauvage au cœur du parc national

Plage de la Palud Port-Cros : une crique sauvage au cœur du parc national

Un écrin turquoise à l’état brut

Au large de la presqu’île de Giens, dans l’archipel paradisiaque des îles d’Hyères, se niche une crique que peu de cartes daignent nommer avec justesse. Et pourtant, la plage de la Palud, sur l’île de Port-Cros, semble sortie d’un rêve méditerranéen où l’homme aurait reculé, et la nature gagné.

Ici, pas de transats alignés ni de bars à cocktails aux noms trop anglophones. Juste la mer, la roche, les pins. Et en toile de fond, cette lumière crue du Sud qui sculpte chaque recoin et donne à l’eau cette teinte irréelle entre bleu céleste et vert amande. Bienvenue dans l’une des dernières vraies plages sauvages de la Côte d’Azur.

Un accès qui se mérite

Je vous préviens : ce bijou ne se laisse pas conquérir par le badaud en claquettes. Pour atteindre la plage de la Palud, il faut d’abord se faire marin. Un bateau vous y mènera depuis le port d’Hyères ou du Lavandou, direction Port-Cros, la plus préservée – et c’est peu dire – des îles d’Hyères.

Une fois débarqué au petit port du village, l’aventure commence. Longez les ruelles ichthyophiles du bourg aux murs couleur miel, comprenez les indications poétiques d’un sentier balisé, puis engagez-vous sur le sentier des plantes rares. Marchez durant 30 à 40 minutes, au rythme des cigales et du parfum entêtant du maquis – lentisques, myrtes, immortelles, une véritable farandole olfactive. Le sentier est parfois escarpé, souvent ombragé, mais toujours sublime.

C’est entre deux pins parasols que, soudain, elle apparaît. La voici, la Palud. Une clairière de sable doré, ceinturée d’une crique rocheuse, baignée par une eau translucide où l’on distingue, à l’œil nu, les posidonies ondulantes et les bancs de saupes argentées.

Un paradis sous surveillance

S’ils sont peu nombreux à fouler le sable de la Palud, ce n’est pas un hasard. L’accès, disons-le franchement, un peu physique, a l’élégance de tenir à distance le vacancier distrait. Mais c’est surtout le cadre ultra-protégé du Parc national de Port-Cros qui garde ce lieu à l’écart des grandes marées touristiques.

Créé en 1963, Port-Cros détient le titre envié de premier parc national terrestre et marin d’Europe. Ici, tout ou presque est interdit – le mouillage sauvage, la pêche (même au lancer espiègle), et même le pique-nique au-delà de certaines zones – mais rien n’est vain. Car ce rigorisme assumé donne à la vie marine un répit rare en Méditerranée.

J’ai eu la chance d’y retourner récemment, après quelques années d’absence. À peine entré dans l’eau, et me voici entouré par une cohorte de poissons, curieuse et presque effrontée. Des sars, des castagnoles, des oblades – tous semblaient me dire : « Ah, toi, tu viens du monde désorganisé là-bas, juste pour plonger ici… » Touché.

Le sentier sous-marin : une balade avec palmes et poésie

C’est l’un des charmes uniques de la Palud : son sentier sous-marin. Conçu pour les nageurs munis d’un masque, de palmes et d’une bonne respiration, ce parcours aquatique long de 200 mètres vous guide à travers cinq bouées informatives mouillées dans cet aquarium naturel.

Pas besoin d’être apnéiste professionnel – ni sirène diplômée – pour suivre la balade. Chaque bouée propose des explications sur la faune et la flore environnantes. On apprend ainsi à identifier une méduse pélagique sans hurler au drame, à saluer une gorgone avec le respect dû à une vieille dame, ou encore à observer les mystérieux labres sans les déranger (ces derniers ayant toujours l’air de savoir quelque chose qu’on ne sait pas).

C’est éducatif sans être ennuyeux, poétique sans être pompeux. En somme, l’éco-tourisme comme on aimerait en voir plus souvent en Méditerranée.

Petites histoires et grandes leçons

Je me souviens d’un moment suspendu, une fin d’après-midi d’août, alors que la lumière inclinait doucement vers l’or. Un couple d’octogénaires – oui, vraiment – s’était installé, presque triomphalement, sur un rocher plat. Ils sortaient d’une baignade apparemment énergique et partageaient des figues sèches et un verre de rosé tiré d’une gourde en aluminium. Spirale temporelle : j’ai vu dans leurs gestes l’élégance d’un art de vivre côtier que nos générations connectées ont un peu perdu.

La Palud, c’est aussi ça. Pas seulement une plage. C’est une mémoire vivante, une leçon de sobriété heureuse. Il n’y a pas de réseau mobile ici – ou presque – et c’est tant mieux. L’écho du vent dans les branches suffit comme message vocal.

Ce qu’il faut savoir avant de partir

On ne s’improvise pas baroudeur insulaire sans un minimum de préparation. Voici quelques conseils pratiques pour profiter pleinement – et respectueusement – de cette perle rare :

Enfin – et ce n’est pas une coquetterie de passionné – informez-vous sur la météo et évitez les jours de mistral. Le vent peut vitre transformer la baignade en rodéo salé.

Une crique à l’écart, une invitation au recul

Dans un monde où le tourisme mange ses propres enfants, la plage de la Palud offre un espace de solitude choisie, presque monacale. Mais ce silence, cette absence de tumulte, n’est pas un vide. C’est au contraire une respiration pleine, une manière différente de voyager. Non pas pour tout voir, mais pour mieux sentir. Pour se laisser happer, lentement, par le rythme d’un monde qui n’a pas besoin de notre frénésie.

Port-Cros, et la Palud en particulier, ne se contentent pas d’être beaux. Ils enseignent quelque chose. Une manière d’habiter les lieux sans les dévorer, d’observer sans posséder, d’aimer sans emporter. Un luxe à la portée de ceux qui veulent bien faire un pas de côté sur leur itinéraire d’été.

Alors la prochaine fois que l’envie vous prend de fuir les plages embouteillées de la Riviera, rappelez-vous : il existe, là-bas, au cœur d’une île discrète, une crique dont les seuls artifices sont ceux de la nature. Et c’est peut-être ça, le vrai chic méditerranéen.

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